Les pre­mières ren­con­tres lib­er­taires amiénois­es du XXIème siè­cle ont eu lieu le same­di 06 juin. Il fai­sait beau. C’était con­vivial et très instruc­tif. Nous le devons à l’intervention de cama­rades parisiens de la Fédéra­tion anar­chiste qui ont partagé avec l’assemblée leurs expéri­ences et réflex­ions. Nous les en remer­cions encore chaleureusement.
Lors de l’exposé, il a été notam­ment ques­tion de l’adhésion de la F.A. à la Sex­ta, et donc du Chi­a­pas. La Sex­ta est la six­ième déc­la­ra­tion de la forêt Lacan­done. Elle s’inscrit dans le long proces­sus d’émancipation col­lec­tive chi­a­panèque ren­du vis­i­ble par l’insurrection des indigènes, le 1er jan­vi­er 1994 au Mexique.

Pour saisir ce qui se joue depuis plus de trente ans au Chi­a­pas, en tant que lieu de résis­tance civile et paci­fique au mod­èle néo-libéral et comme espace de créa­tion d’alternatives con­crètes, le livre de Guil­laume Goutte, Tout pour tous ! L’expérience zap­atiste, une alter­na­tive con­crète au cap­i­tal­isme, est un très bon outil.

toutpourtous.gifCet ouvrage syn­thé­tique explique com­ment le mou­ve­ment zap­atiste s’inscrit dans une his­toire vieille de cinq cents ans, celle de la résis­tance des peu­ples indi­ens aux oppres­sions, depuis la coloni­sa­tion des Amériques jusqu’au cap­i­tal­isme con­tem­po­rain. Le réc­it de la con­sti­tu­tion de l’Armée zap­atiste de libéra­tion nationale (EZLN) vient ensuite, ain­si que celui du dépasse­ment cri­tique du marx­isme-lénin­isme et du gue­varisme qu’elle a effec­tué au con­tact des pop­u­la­tions locales. Deux chapitres sont enfin con­sacrés à l’organisation de la vie civile, aux réal­i­sa­tions col­lec­tives en ter­mes d’éducation, de san­té, et d’économie, et à l’inscription de ces actions dans un réseau inter­na­tion­al. Les con­tra­dic­tions appar­entes (quel rôle peut jouer une armée, fût-elle zap­atiste, dans la con­struc­tion d’une société réelle­ment démoc­ra­tique ?), les dif­fi­cultés d’un tel pro­jet, et les réflex­ions menées sur la per­ti­nence de le penser comme un mod­èle repro­ductible sont traitées sans fard.

Et c’est pro­phy­lac­tique. Car à l’heure des séré­nades podemiques et post-syrizesques, il est grand temps de ramer à con­tre-courant des riv­ières de l’oubli médi­a­tique, celles de l’information immé­di­ate, de la mode et du présent per­ma­nent qui oblitèrent la déter­mi­na­tion, la per­sis­tance, l’étendue, et le suc­cès des réelles alter­na­tives en actes. Loin des clô­tures élec­toral­istes, notre réap­pro­pri­a­tion de l’activité poli­tique requiert une redéf­i­ni­tion col­lec­tive des fron­tières du pens­able pour pro­gress­er sur les chemins de l’émancipation com­mune, accom­pa­g­nés, en pen­sée, de Don Duri­to de la forêt Lacan­done(1). Ya Basta !

Ref­er­ences

Ref­er­ences
1 Don Duri­to, scarabé chi­a­panèque fumeur de pipe, est un com­pagnon du sous-com­man­dant Mar­cos. Il voy­age, sur sa tortue nom­mée Pégase, afin d’affiner ses réflex­ions poli­tiques dont on peut trou­ver quelques morceaux choi­sis dans le recueil éponyme Don Duri­to de la forêt Lacan­done aux Edi­tions de la Mau­vaise Graine.