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“Le col­lec­tif La Brèche, fonc­tion­nant en auto­ges­tion et n’ayant pas de porte-parole, choisit aujour­d’hui de s’ex­primer sous la forme d’un com­mu­niqué, dans la volon­té de faire enten­dre sa voix alors que pèse forte­ment sur le lieu qu’il occupe, la Mai­son Coz­ette, un risque d’expulsion.

Afin de faire com­pren­dre le sens de notre occu­pa­tion, nous pen­sons qu’il est néces­saire d’ex­pli­quer l’o­rig­ine du col­lec­tif et ce qu’il a réal­isé jusqu’à aujourd’hui.
C’est de la ren­con­tre, pen­dant la mobil­i­sa­tion con­tre la loi tra­vail, de per­son­nes d’hori­zons dif­férents (étu­di­ants, pré­caires, mil­i­tants, salariés) qu’est née l’en­vie ou plutôt l’ex­pres­sion d’un besoin de pou­voir se retrou­ver, s’au­to-organ­is­er mais aus­si s’ou­vrir aux autres au sein d’un lieu qui ne lim­it­erait pas nos pos­si­bil­ités. Ce lieu aurait donc l’am­bi­tion de pour­suiv­re les débats et d’élargir la “cri­tique” à plus de sujets après la fin du mou­ve­ment social.

La Mai­son Coz­ette, située place Vogel, léguée à la ville d’Amiens par M. Coz­ette afin de con­tribuer à “l’ex­tinc­tion de la men­dic­ité”, mais lais­sée à l’a­ban­don depuis 2004, jusqu’à sa vente prochaine à un grand pro­mo­teur lil­lois, sem­blait le lieu idéal, de par son posi­tion­nement et sa super­fi­cie. La réap­pro­pri­a­tion de ces locaux placés en cen­tre-ville d’Amiens avait d’au­tant plus de sens, alors que la gen­tri­fi­ca­tion tend tou­jours plus à exclure les pau­vres du cœur de la ville.

Ce vaste lieu allait donc répon­dre à de nom­breuses attentes : tout d’abord en terme de loge­ment, mais aus­si en terme d’e­space disponible riche en pos­si­bil­ités (réal­i­sa­tion d’ate­liers, con­certs, réu­nions, pro­jec­tions, débats, etc…) que nous souhaitions pro­pos­er à tous.

Le 1er octo­bre 2016 a eu lieu l’in­au­gu­ra­tion de la Mai­son Coz­ette avec sa pre­mière ouver­ture au pub­lic, qui fut un franc suc­cès (bien plus d’une cen­taine de per­son­nes pour ce pre­mier soir). Très rapi­de­ment, un plan­ning est mis en place et de nom­breuses idées se con­cré­tisent. Tout d’abord des ate­liers d’écri­t­ure, d’ex­péri­men­ta­tion pho­to, de col­lages, de mar­i­on­nettes, des répéti­tions de troupes de théâtre et de groupes de musique, des cours de philoso­phie, d’arabe, d’espéranto, de yoga, d’arts mar­ti­aux, activ­ités aux­quelles s’est ajoutée la mise en place d’une bib­lio­thèque de prêt.

Ces ate­liers ne sont pas néces­saire­ment réal­isés par des habi­tants du lieu, mais sou­vent par des per­son­nes qui, bien que ne vivant pas sur place, s’in­vestis­sent régulière­ment dans ces locaux. Car cette ouver­ture à l’ex­térieur se fait dans les deux sens : si nous avons pro­posé de nom­breuses choses, rien n’au­rait été pos­si­ble sans le sou­tien act­if de nom­breuses per­son­nes qui nous ont aidés à réha­biliter le lieu, nous ont fait de très nom­breux dons (meubles, objets du quo­ti­di­en, mais aus­si très sim­ple­ment de la nour­ri­t­ure) et nous appor­tent régulière­ment une aide dans l’or­gan­i­sa­tion générale.

Par ailleurs, le col­lec­tif La Brèche met égale­ment à dis­po­si­tion de dif­férentes asso­ci­a­tions poli­tiques et syn­di­cales des espaces de réu­nion, choix qui s’ex­plique autant par la volon­té du col­lec­tif de s’en­gager poli­tique­ment que celle d’of­frir une réponse au choix de la Mairie qui veut ren­dre payante aux asso­ci­a­tions et syn­di­cats l’u­til­i­sa­tion des salles munic­i­pales. Mais cet engage­ment n’est lié à aucun par­ti poli­tique ; le col­lec­tif porte sa voix lui-même, reste indépen­dant et refuse caté­gorique­ment qu’on puisse par­ler en son nom sans que cela n’ait été décidé collectivement.

En accord avec nos moti­va­tions ini­tiales d’ac­cès du lieu à tous, nous organ­isons égale­ment des événe­ments réguliers tels que des con­certs, des pro­jec­tions, des con­férences ges­tic­ulées, dont l’en­trée et les repas sont sou­vent soit gra­tu­its, soit prix libre (cha­cun donne ce qu’il peut, ce qu’il veut), soit plus rarement à petit prix (3 euros maximum).

Au-delà d’être un lieu de pas­sage réguli­er, de ren­con­tre et d’échange, la Mai­son Coz­ette représente aus­si pour beau­coup une pre­mière expéri­ence ou une décou­verte du squat. Ce lieu per­met aus­si de dépass­er les idées pré­conçues véhiculées par les médias et l’opin­ion publique sur le sujet. En effet, les squat­teurs sont bien plus sou­vent ani­més par la volon­té d’en­tretenir et de faire vivre par des pro­jets pro­duc­tifs l’e­space qu’ils occu­pent plutôt que de le dégrad­er et le ren­dre insalubre.

Insen­si­ble à cette énergie, la Mairie a assigné au palais de jus­tice les habi­tants de la Mai­son Coz­ette le 19 octo­bre 2016, en même temps que les Goodyear. La Mairie n’ayant pas saisi la bonne cham­bre du tri­bunal, elle dut retir­er sa plainte. Par la suite, une nou­velle audi­ence a été pro­gram­mée pour la date du 12 décem­bre, dont le délibéré a été ren­du le 9 jan­vi­er 2017 : le lieu est désor­mais men­acé d’ex­pul­sion à par­tir du 30 jan­vi­er et ceci sans tenir compte de la trêve hiver­nale. Une forme de pres­sion est ain­si exer­cée sur le col­lec­tif mais nous ne freinerons pas pour autant nos activités.

Ce n’est pas ce cli­mat d’in­cer­ti­tude qui empêchera le col­lec­tif La Brèche de rester act­if : nous pour­suiv­ons la pro­gram­ma­tion et sommes tou­jours intéressés par la mise en place de nou­veaux ate­liers et événe­ments. De nou­velles dates de con­certs, des pro­jec­tions ain­si que des con­férences ges­tic­ulées sont en cours d’organisation.

Avec votre sou­tien la Mai­son Coz­ette peut sur­vivre, elle se nour­rit de l’én­ergie des per­son­nes qui la vis­i­tent, la fréquentent, s’y réu­nis­sent, qui y fes­toient, y débat­tent, y cuisi­nent, y étu­di­ent, y brico­lent… et surtout du sou­tien des prochains qui franchi­ront ses portes.

Le pro­gramme est acces­si­ble sur la page Face­book du col­lec­tif La Brèche et prochaine­ment sur son site inter­net.

Voir aus­si le com­mu­niqué du groupe Alexan­dre Mar­ius Jacob et de la CNT-EFI Nord-Pas de Calais du 25 octo­bre 2016